Il était une fois les nomades

A la recherche des nomades disparus

C’est un paradoxe de notre époque. Alors qu’on n’a jamais été aussi mobiles, il y a de moins en moins de nomades sur la planète. Au Maroc, entre 2004 et de 2014, leur population a baissé de 63 %. Les 25 000 nomades restants ont bien du mal à perpétuer un mode de vie et une culture ancestraux qui ont façonné la société marocaine.

Sans les nomades, le monde d’aujourd’hui ne serait pas ce qu’il est. Le pastoralisme a joué un rôle essentiel dans le développement des sociétés rurales. Les nomades ont aussi été les initiateurs des premiers grands échanges internationaux. La Route de la Soie entre la Chine et le Proche-Orient et les caravanes sahariennes n’ont pas transporté que des marchandises, mais aussi des idées et des cultures.

Le déclin du nomadisme s’est enclenché depuis longtemps au Maroc. La tendance s’est renforcée avec la constitution d’un État centralisé, délimité par des frontières et plus facile à contrôler.

Les nomades, eux, n’ont jamais connu de frontière. Ils ont toujours circulé librement dans de vastes espaces qui n’appartenaient à personne, en se laissant guider par les étoiles. Le nomadisme était lié aux saisons qui commandaient les migrations et les transhumances. Les cycles de la nature déterminaient les rythmes de la vie.

Une sédentarisation inéluctable

Vivre en symbiose avec la nature est de plus en plus difficile. La désertification menace les oasis et les grandes sécheresses des années 80 et 90 ont fait prendre conscience aux nomades de la fragilité de leur situation. Beaucoup ont vendu leurs troupeaux pour acheter une maison et un bout de terre. Et aujourd’hui, ils aspirent à offrir l’école à leurs enfants et la santé à leur famille. Alors ils se sédentarisent irrémédiablement.

Pourtant ils restent très attachés à leur culture ancestrale. Même sédentaires, ils ressortent volontiers la khaïma pour les fêtes, les mariages ou les naissances. Et, dans le désert, certains propriétaires de troupeaux, pour garder un semblant de lien avec la tradition, confient leurs bêtes à des bergers qu’ils visitent en 4×4 une fois par semaine.

Si le nomadisme se meurt, on n’a jamais autant circulé sur la planète. Les avions remplacent les mules et les TGV, les dromadaires. Mais on a oublié ce qui fait l’essence-même du voyage, une certaine lenteur et une communion avec la nature.

Pour toujours ?