Signes d’une richesse enfouie

LE BARBE : CE CHEVAL QUI MURMURAIT À L’OREILLE DES BERBÈRES

Contrairement à ce que l’on croit, en Afrique, le cheval est omniprésent. Particulièrement dans les terres du Nord, depuis la Lybie jusqu’au Maroc, où ses traces ont marqué l’histoire, les croyances, l’art rupestre et les contes. De tous, le Barbe est celui qui, par son état d’esprit, a su inspirer les civilisations du monde entier…

Symbole d’endurance, monture de guerre, emblème de frugalité… Le Barbe, ou « Cheval de Barbarie » par les auteurs Romains, est sans doute l’être qui sait le mieux dissimuler son jeu. Assez court et fin, quelque peu anguleux, au profil rectiligne et à la longueur souvent carrée et médioligne,… Tout y est pour le classer, selon les standards humains de la Beauté, dans la catégorie « peu élégant ». Et pourtant, cette race chevaline, originaire du Grand Maghreb, son berceau, et élevée par les tribus nomades, est dotée d’un caractère et d’une force intérieure exemplaires. « Il peut la faim, il peut la soif, il peut le froid, il peut le chaud, jamais il n’est fatigué », écrit, à son propos, le Général Eugène Daumas dans les Chevaux du Sahara. En effet ! Le Barbe s'acclimate parfaitement, aussi bien à la sécheresse du désert qu’à l’altitude des hauts plateaux. Lymphatique au repos, il bouillonne d’énergie dès qu’on le sollicite. Un faux tempérament froid qui, mêlé à une intelligence étonnante, en fait le cheval d’instruction idéal.

Un enracinement originel

À en croire les récits, le cheval Barbe serait l’une des plus anciennes races au monde. De nombreuses preuves en témoignent, notamment les études paléontologiques menées aux gisements de Kef el Moumen au Maroc et Phacochères en Algérie, les gravures et peintures rupestres ainsi que les monuments dressés tout au long du Nord de l’Afrique. Certains philosophes Grecs le considèrent, depuis l’antiquité déjà, comme l’emblème de la grâce chevaline. C’est celui que sculpte Phidias dans « la Frise du Parthénon » et que décrit le philosophe Xénophon dans son traité « De l’art équestre » comme « le portrait du cheval parfait ». Plus intrigant encore : certains écrits mythologiques le mentionnent comme Monture du géant Atlas ou encore Cheval du Royaume des Ténèbres (voir notre article sur Atlas, qu’es-tu ?).

« Barbe » - « Barbare » - « Berbère »

Regardons de plus près… Outre la racine étymologique, ne semble t-il pas qu’il existe une analogie très frappante entre l’état d’esprit du cheval Barbe et celui de l’Homme berbère ? Même résistance, même souplesse, même agilité, même philosophie de l’ardeur, tous deux ont beaucoup en commun. Tout juste cette allure modeste, cette frugalité gracieuse, cette sagesse dissimulée qui connaît ses capacités, sait tempérer sa vivacité et faire bon usage de sa force. Un puissant équilibre qui en fait l’être « bon en tout, excellent en rien ». Au fond, ne serait-ce pas la voie de l’invincibilité ?