Guide pour se perdre en montagne

Les hauts et les bas de l’alpinisme

Vous en connaissez beaucoup, vous, des alpinistes qui aiment se perdre en montagne ? Paolo Morelli en fait partie. Mais peut-on le prendre au sérieux ? Cet écrivain italien iconoclaste n’aime rien tant que bousculer les idées reçues. Dans son « Guide pour se perdre en montagne » (Éditions Paulsen), il s’en donne à cœur joie. Un petit livre précieux, drôle, poétique et plein de bon sens.

« Avec les téléphones portables, l’alpiniste solitaire est l’une des causes les plus fréquentes des accidents en montagne. » Ce genre de phrase sous forme de punchline, le livre de Paolo Morelli en regorge. À bientôt 70 ans, cet écrivain, scénariste, critique de cinéma, chroniqueur de foot et même musicien de jazz, est connu pour ne pas épargner grand-monde.

Cette fois, c’est aux alpinistes qu’il s’en prend. Et c’est drôle. Comme lorsqu’il pointe du doigt « ces nigauds qui redescendent, plein gaz, vers leurs appartements pour consulter, à la chaleur du radiateur, les cartes, livres et documents qui tueront l’esprit d’aventure de leur prochaine sortie. »

Guide des outils indispensables en montagne (pour lui, l’humour est aussi important que le piolet), guide des rencontres (du chamois aux montagnards) qu’il fait sur les sommets des Alpes italiennes, son livre écrit sous forme d’abécédaire revendique sa mauvaise foi. Il prévient d’ailleurs « qu’en vagabondant en haute montagne, à cause de la fatigue et d’une condition physique précaire, le sens des mots peut passer sans prévenir du noir au blanc. »

Se perdre pour savoir où l’on va

Mais quelles vertus Paolo Morelli trouve-t-il donc au fait de se perdre en montagne ? Il y répond au chapitre « Expérience » : « la seule occasion d’acquérir une vraie connaissance, la seule qui en vaille la peine, c’est de se perdre. Si on ne sait plus où on va ni d’où on vient, si avancer c’est se tromper à coup sûr, si on éprouve malgré tout le besoin d’aller de l’avant… c’est en réalité la seule expérience qui régénère. »

Alors, on ne résiste pas au plaisir de se perdre avec lui au gré des pages :

« Certains pensent que la prudence consiste à avoir le courage de faire demi-tour : ceux-là feront carrière dans l’alpinisme. »

Ou encore : « En montagne, il y a une époque où non seulement on plantait des clous, mais on les retirait. Aujourd’hui, les parois ressemblent aux chefs-d’œuvre de l’art contemporain qui, comme tous les chefs-d’œuvre, tuent l’art. »

Ce petit guide est une vivifiante errance en altitude.